L’évolution de la justice…vers une justice réparatrice et participative
Chers lecteurs, je souhaite vous faire part de quelques réflexions, sur un nouveau type de justice. Une chaîne réputée très sérieuse a proposé une émission consacrée à ce thème.
Quel est le fonctionnement ?
Mère et grand-mère de deux victimes d’homicide, Madame X a engagé une démarche de dialogue avec le meurtrier et veut promouvoir « une justice restaurative » qui cherche à répondre aux questions suivantes : quel dommage a été commis ? quels besoins en résultent et pour quelles personnes ? quelle est la meilleure punition ?
Madame X a engagé une correspondance avec le meurtrier de sa fille et de son petit-fils, condamné à perpétuité en Floride. Une compréhension pour la victime, en l’occurrence l’ayant-droit des personnes tuées, voire un pardon se construit au cours des échanges épistolaires. Pour le condamné, c’est aussi le moyen de comprendre son geste.
Cette pratique se développe aux Etats-Unis ainsi qu’au Canada.
Ce documentaire, plutôt passionnant illustre le parcours intime et courageux qui conduit ces familles à souhaiter rencontrer les assassins de leurs proches.
L’impact sur les parents des victimes est immense : les témoins interviewés racontent combien ils sont apaisés par le fait de mettre un mot sur la douleur, d’apprendre de la bouche du condamné les circonstances du crime. Cela peut paraitre inconcevable mais les témoins évoquent effectivement un sentiment d’apaisement. Ce lien permet également au condamné de prendre conscience de la douleur engendrée par son acte. En outre, le regard posé sur le condamné est modifié, il est à nouveau considéré comme un être humain.
Ce documentaire démontre combien sont importantes la relation humaine et la communication.
Ce documentaire m’a d’autant plus intéressée qu’il m’est arrivé à plusieurs reprises de participer à cette justice réparatrice.
En effet, dans le cadre de dossiers d’homicide volontaire ou de coups et blessures volontaires, les parents des victimes ou les victimes elles-mêmes ont cherché à établir ce lien si fragile avec l’auteur des faits, soit pour essayer de comprendre son geste, soit pour lui manifester leur douleur.
Me revient tout particulièrement à l’esprit une affaire plaidée en Ardèche. Il s’agissait d’un jeune motard de 19 ans qui suite à une imprudence avait renversé une vieille dame et l’avait tuée. Je représentais la famille de la victime et l’ainé de la fratrie m’avait clairement exprimé qu’il voulait parler à ce jeune homme. J’ai orienté ma plaidoirie de manière à faire comprendre au magistrat le désir de la famille. Le motard a été condamné à une peine sévère mais à la fin de l’audience, après la délibération et hors tribunal, la famille de la vieille dame a pu entamer un dialogue avec le jeune homme. Cette démarche a été profitable pour tout le monde. Mes clients ont pu exprimer leur douleur au responsable de la mort de leur mère et grand-mère. Le jeune homme a également pu s’exprimer et demander pardon.
La clé de réussite de cette démarche, à travers mon expérience, repose sur une volonté sincère de dialogue de part et d’autre. Les parents des victimes n’y parviennent qu’en dépassant le désir de vengeance que tout être peut ressentir légitimement en de telles circonstances. On peut y parvenir en une seule fois, on peut être obligé d’y revenir plusieurs fois.
Pour autant, le bénéfice est immense pour les deux parties : apaisement pour les victimes, travail sur soi pour l’auteur du délit et prise de conscience de la douleur de l’autre.
L’individu en sort grandi.
Et vous, qu’en pensez-vous ?